Effets de l’exposition aux rayonnements ionisants sur plusieurs générations dans le biote non humain 

Shayenthiran Sreetharan | Université McMasterSalle Enoch ABC

Contexte 

Les risques d’effets délétères radio-induits sur la descendance, et donc sur les prochaines générations sont une préoccupation majeure pour les parents exposés aux rayonnements ionisants d’origine professionnelle, médicale ou environnementale. À ce jour, les systèmes de protection radiologique ne quantifient pas ou ne prennent pas en compte la possibilité des effets pouvant se manifester sur les générations suivantes après l’exposition initiale. Un groupe de travail (GT121) du Comité 1 de la Commission internationale de protection radiologique (CIPR) a été créé en 2021 pour étudier les effets des rayonnements ionisants sur la descendance et les prochaines générations. Un objectif du GT121 était d’examiner la documentation sur les effets multigénérationnels (dans lesquels l’exposition se poursuit sur plusieurs générations) et transgénérationnels (dans lesquels les générations suivantes ne sont pas exposées pendant la période de récupération) dans les biotes non humains. La durée plus courte des générations pour les espèces non humaines, offre un outil unique pour surveiller et étudier des effets générationnels après une exposition à des rayonnements, bien que les différences biologiques et physiologiques sous-jacentes entre ces espèces doivent être soigneusement prises en compte. 

Méthode 

Une analyse de multiples bases de données en ligne (Google Scholar, PubMed, Scopus) a été réalisée en 2022 en effectuant des recherches de mots-clés sur les sujets comme les effets multi- et transgénérationnels des rayonnements ionisants chez les espèces non humaines. Les expériences contrôlées en laboratoire ou sur le terrain ont été considérées ; ces dernières contenant généralement des études écologiques réalisées dans la zone d’exclusion de Tchernobyl ou la préfecture de Fukushima-Daiichi. En plus des études identifiées des bases de données en ligne, nous avons également pris en compte les publications de synthèse, les actes de congrès et les rapports d’experts. 

Résultats 

Les études ont été regroupées en catégories basées sur le modèle d’organisme utilisé, qui comprend des espèces de bactéries, de nématodes, d’annélides (principalement Caenorhabditis elegans), de crustacés (principalement Daphnia magna), d’insectes, d’amphibiens, d’oiseaux, de poissons, de mammifères et de plantes. Les détails concernant le calendrier d’exposition (multigénérationnelle, transgénérationnelle ou environnementale), le nombre de générations étudiées, les critères surveillés et les résultats ont été résumés dans un tableau. Des effets sur la modification des paramètres de reproduction ont été signalés chez la progéniture, une observation présente pour différents modèles étudiés. Dans certaines études, une diminution de la survie chez la progéniture a également été observée, cependant ces études impliquaient généralement une exposition chronique et persistante de nombreuses générations à un champ de rayonnement ou à la suite de doses aiguës très élevées dans le cadre d’études transgénérationnelles. Un certain nombre d’études sur différentes espèces étudiées ont rapporté des changements dans les critères génétiques et épigénétiques surveillés, avec la transmission des changements épigénétiques dans les générations suivantes ayant déjà été décrite comme un mécanisme possible pour les effets de l’irradiation sur plusieurs générations ou sur le plan transgénérationnel. Des changements dans la méthylation du génome, des modifications des histones, des aberrations chromosomiques et d’autres mutations ont été rapportés chez des espèces de plantes (Arabidopsis thaliana et lin), de nématodes (Caenorhabditis elegans), d’insectes (Drosophila melanogaster) et d’amphibiens (rainettes du Japon et rainettes de l’Est). Globalement, la diversité des données disponibles sur le biote non humain complique l’application des résultats rapportés dans les systèmes de protection radiologique. Nous proposons que des différences de sensibilité aux rayonnements entre les espèces, la transférabilité des données entre différentes espèces, la présence d’adaptation et de réponses adaptatives et la reconstruction des doses sur les générations suivantes et finalement l’extension des connaissances à l’homme représentent les principales lacunes dans ce domaine. 

Conclusion 

L’objectif de cette présentation était de procéder à une revue documentaire des études portant sur les effets multi- et transgénérationnels dans le biote non humain et d’envisager l’incorporation de ces données dans les systèmes de protection radiologique. Les effets signalés en matière d’altération de la reproduction représentent un sujet de préoccupation potentiel en raison de l’importance de la structure de la population et de l’écosystème dans le cadre de la radioprotection écologique. Cela contraste de la radioprotection humaine qui considère les effets au niveau individuel. Les travaux futurs du groupe de travail 121 de la CIPR continueront à réviser cette documentation et une publication finale de la CIPR sera publiée pour la communauté de la radioprotection. 

Tue 4:30 pm - 5:30 pm